Conciliation, médiation : la culture de l'amiable s'enrichit de nouveaux textes

Conciliation, médiation : la culture de l'amiable s'enrichit de nouveaux textes

Résolution amiable des litiges - 1er septembre 2023

La résolution amiable des conflits est de plus en plus privilégiée par les acteurs de la justice, non seulement pour ses avantages pratiques mais aussi pour sa capacité à maintenir ou restaurer des relations apaisées entre les parties. 

Il convient tout d’abord de rappeler les avantages des modes alternatifs de règlement des différents :

Économie de temps

L’une des principales raisons pour lesquelles la résolution amiable des litiges est encouragée réside dans la durée souvent limitée de ces procédures. En effet, les affaires judiciaires peuvent prendre des mois, voire des années, à résoudre, sans parler des coûts associés à ces délais.

Moins de coûts financiers

Au-delà du gain de temps, le coût est un autre facteur déterminant. Les honoraires d’avocats, les frais de justice et les autres dépenses associées aux procédures judiciaires peuvent être onéreux. En comparaison, les procédures de résolution amiable des litiges sont généralement moins coûteuses.

Maintien de la relation entre les parties

Dans les affaires où les relations personnelles ou professionnelles sont en jeu, une résolution amiable permet de maintenir, voire de restaurer, une relation saine entre les parties. Cette dimension relationnelle est presque impossible à maintenir dans le cadre d’un procès.

LA CLARIFICATION DU CADRE LÉGAL INITIAL

Dans une volonté de désencombrer les juridictions, le législateur a prévu en 2016 que certaines actions en justice, sauf exceptions, devaient être précédées d’un mode alternatif de règlement des conflits, comme la conciliation ou la médiation ou encore la procédure dite participative. 

En 2019, le Code de procédure civile a été doté d’un nouvel article précisant le régime de cette obligation. Il s’agit de l’article 750-1 du Code de procédure civile, lequel – après quelques vicissitudes – a été récemment modifié par le Décret n° 2023-357 du 11 mai 2023, relatif à la tentative préalable obligatoire de médiation, de conciliation ou de procédure participative en matière civile.

Au terme de cet article 750-1 du Code de procédure civile, toute demande de justice doit être précédée d’une tentative de conciliation – menée par un conciliateur de justice – d’une médiation ou d’une procédure participative, au choix des parties.

Cette obligation – dont le défaut de respect est sanctionné par l’irrecevabilité de l’action en justice – est limité dans son domaine d’application. Elle ne concerne que les actions ayant pour objet une demande de paiement d’une somme n’excédant pas 5000 euros ou les actions relatives à un trouble anormal de voisinage ou un conflit de voisinage.

Cette obligation est également limitée dans son étendue puisqu’elle connaît de nombreuses exceptions comme, par exemple, la justification d’un motif légitime tenant à l’urgence, aux circonstances particulières de l’affaire ou à l’indisponibilité des conciliateurs de justice.

Concernant les litiges n’entrant pas dans le domaine d’application de cette disposition, les magistrats ont développé une pratique consistant à inviter – et plus récemment à enjoindre – les parties à rencontrer un médiateur, afin d’assister à une réunion d’information à la médiation. Cette première réunion, gratuite, réunit le médiateur désigné par le Magistrat, les parties et leurs avocats (quand la procédure initiée rend obligatoire la représentation par avocat).

Au terme de cette réunion, les parties sont libres de s’engager ou non dans un processus de médiation, pendant lequel l’instance est suspendue.

 

Il convient de préciser que le taux de succès des modes alternatifs de règlement amiable des différents est incroyablement élevé. À titre d’exemple, la CMAP (Centre de Médiation et d’Arbitrage de Paris) qui publie chaque année un « Baromètre de la médiation » fait état d’un taux d’accords obtenus à hauteur de 95% dans un délai de 65 jours en moyenne (chiffres de l’année 2022, concernant la médiation de la consommation).

LA CRÉATION DE L’AUDIENCE DE RÈGLEMENT AMIABLE

Pour autant, le règlement amiable des différents peine à s’ancrer dans la culture française. C’est l’une des raisons pour laquelle le législateur a de nouveau souhaité renforcer le dispositif par la publication d’un nouveau texte : le Décret ° 2023-686 du 29 juillet 2023 portant mesures favorisant le règlement amiable des litiges devant le tribunal judiciaire.

 

Ce nouveau décret, venant enrichir le Code de procédure civile, donne  des moyens concrets aux juges pour orienter les parties vers une résolution amiable de leur litige.

 

À compter du 1er novembre 2023, le juge saisi d’un litige porté devant le Tribunal judiciaire pourra, à la demande de l’une des parties ou d’office après avoir recueilli leur avis, décider qu’elles seront convoquées une audience de règlement amiable tenue par un autre juge, lequel ne siègera pas le cas échant dans a formation de jugement.

 

Au terme de l’article 774-2 du Code de procédure civile : 

 

« L’audience de règlement amiable a pour finalité la résolution amiable du différend entre les parties, par la confrontation équilibrée de leurs points de vue l’évaluation de leurs besoins, positions et intérêts respectifs, ainsi que la compréhension des principes juridiques applicables au litige ».

 

Le juge chargé de l’audience de règlement amiable pourra prendre connaissance des conclusions et des pièces changées par les parties ; procéder aux constatation, évaluations, appréciations ou reconstitutions qu’il estimera nécessaires. Il pourra également décider d’entendre les parties séparément.

 

À l’issue de cette audience, le juge chargé de l’audience de règlement amiable, assisté du greffier, pourra – à la demande des parties – constater leur accord, total ou partiel et en informer le juge saisi du litige, qui prendra fin. À défaut d’accord, les parties seront renvoyées devant le juge saisi et la procédure judiciaire se poursuivra.

 

Avec ce nouveau texte, le juge voit son rôle de conciliateur renforcé. Ce dispositif – qui n’est pas à confondre avec la médiation, qui est un mode de règlement des litiges tout à fait différend – impliquera probablement de nouvelles difficultés procédurales, notamment concernant le mécanisme de la « césure » non évoquée ici. 


Toutefois, ces nouvelles dispositions sont de nature à renforcer les méthodes amiables de règlement des litiges et nous invitent – en qualité d’avocats – à inciter davantage nos clients à s’orienter vers ces solutions plus humaines, moins chronophages et plus économiques, et ce avant même de saisir le juge.

 

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